ATELIER - Ecrire sans se retourner
Ecrire sans se retourner, sans jeter un regard par-dessus ses épaules, au risque sinon de se transformer en statue de sel et fondre à la première pluie de larmes. Mauvaise nostalgie, vilains souvenirs, écrire en regardant en avant, coûte que coûte, se boucher les oreilles à la cire, ne pas entendre les sirènes enchanteresses du passé remaquillé. Se souvenir, peut-être, mais se souvenir de tout alors, le bon comme le mauvais, pour deviner au chemin parcouru la route à suivre. Et poser l'un après l'autre les pieds devant soi.
Comment déjà apellait-on le personnage mythique au visage tourné vers l'arrière, aux pieds dirigés vers l'avant ? Combien de fois sur sa route est-il tombé sur des cailloux ? Dans combien de fossés a-t-il versé ? Les genoux couronnés, le coeur meurtri, il continue pourtant, bête et têtu comme le Temps. Et plus il avance, plus longue lui paraît la route, et plus enviable le point de départ. Le sombre imbécile. Lui qui regrette chaque pas effectué n'a pas même le courage de l'immobilisme.