Hygiène
Je déteste le mot hygiène. J'ai toujours détesté le mot hygiène. Quand j'entends hygiène, j'ai immédiatement envie de me frotter avec un gant de crin et de l'eau de javel. Quand je prononce le mot hygiène, mes dents se jettent hors de ma bouche et plongent toutes seules dans un bain de dentifrice.
Du haut de ses soixante-dix ans avoués d'un sourire modeste et de ses cinquante ans apparents (où cache-t-elle donc ses vingt dernières années de vie?), elle me donna maternellement une flopée de conseils. Hygiène de vie, me dit-elle. Ca commençait mal. (Je lui pris immédiatement un de ces gels qui tuent tous les microbes, virus, sales bébêtes - enfin quatre-vingt dix-neuf pour cent, le un pour cent restant à part tremblant et nous faisant frémir.) Une bonne alimentation. Un esprit positif. Une légère crème de jour. Une riche crème de nuit. Une plate crème antirides, cela va sans dire. Tout l'alphabet des vitamines. Des antioxydants oxygénés. Un peu de cuivre, un peu d'or, un peu d'argent, régulièrement. Des oligoéléments. Des onguents. Des omégas, trois, six et neuf. De l'huile de ricin. De l'huile de foie de morue. Alternativement et en même temps.
C'était la pharmacienne de Bir-Hakeim.